EXTRAIT DU DISCOURS PRONONCE À BAMAKO AU MEETING DE MASSE A L'OCCASION DU PREMIER ANNIVERSAIRE DE L'ECLATEMENT DE LA FEDERATION DU MALI (20 août 1961)
« ... Dans la nuit du 19 au 20 août 1960 a été consacrée
la rupture de la Fédération du Mali, consécutive aux contradictions
inconciliables qui existaient entre les responsables des deux Etats.
« En outre, l'activité politique du Mali, donc celle de l'Union
Soudanaise-R.D.A. est basée sur la démocratie et l'usage intégral
en toutes occasions et à tous les niveaux, des méthodes démocratiques,
alors qu'au Sénégal, n'existaient et n'existent encore que des
cliques électorales.
Nous étions obligés de travailler contre notre conscience et nos
convictions. Nous avions pensé que le peuple du Sénégal
allait pouvoir liquider Senghor,
qui, comme chacun le sait, est plus Français que le plus Français
des Français.
L'élaboration d'une politique internationale, économique et sociale
en Fédération du Mali allait être la source de l'aggravation
des divergences déjà existantes.
- Les responsables de la République Soudanaise étaient
convaincus que le «non-alignement» constituait une des meilleures
garanties de survie et de développement harmonieux pour des pays jeunes.
Ils pensaient aussi qu'il était nécessaire de liquider les excroissances
nocives, les survivances du régime colonial dans le domaine économique
et que par conséquent, à la formule d'exploitation étrangère
jusqu'ici en vigueur, il fallait substituer l'exploitation par le peuple et
au seul bénéfice du peuple !
La tâche consistait de ce fait à attaquer et à détruire
toutes les séquelles du régime défunt : gabegie, contrebande,
usure, mercantilisme, et toutes les tares d'un régime dont le pourrissement
n'était pas notre œuvre, et que nous ne pouvions laisser persister.
Il fallait que l'économie de la Fédération fût orientée
vers le socialisme, ce qui ne convenait point à Senghor qui est d'essence
occidentaliste et capitaliste.
La tâche pour nous était difficile, et seule notre volonté
et nos convictions nous permettaient de la poursuivre. Mais c'est bien au cours
du séminaire des jeunes et du congrès de l'U.P.S., section du
Parti de la Fédération Africaine d'alors, que la tension fut accentuée
et que nos adversaires rassemblèrent en hâte tous les matériaux
qui leur semblaient nécessaires pour attenter mortellement à la
vie de la Fédération du Mali.
Au cours de ces réunions des cadres d'un parti dont j'étais le
secrétaire général, j'ai eu à développer
devant les militants les positions du Parti face à l'indépendance,
à l'africanisation des postes qui est une des garanties de l'indépendance
réelle, face aussi à plusieurs autres problèmes communs
dont une solution objective doit être la préoccupation de tous
les Etats vraiment libres.
Cette mise au point devait accélérer le processus d'éclatement
de la Fédération déjà préparé par
la France parce que notre soutien à l'Algérie combattante était
ferme ;
Notre orientation vers une économie socialiste, n'était plus un
secret, de même que notre vœu de créer une zone monétaire
africaine.
Vous connaissez tous, aujourd'hui, le « secret » de l'éclatement
de la Fédération du Mali, de même que vous savez tous que
cette Fédération n'a été qu'une union contre nature.
..
Vous savez, de ce fait, pourquoi nous avons tous retenu la date du 19 août
1960, parce que c'est à partir d'elle que nous sommes devenus nous-mêmes.
A présent, la République du Mali mène une politique conçue
par notre Parti, l'Union Soudanaise-R.D.A., qui est l'expression de notre peuple.
Tout le monde sait que le Mali est indépendant, même ceux qui sont
contre nous!
Nous continuerons d'aller de l'avant !
Il y en a qui vous ont dit, qui vous diront encore en cachette et avec un ton
paternaliste :
- Vous ne pouvez pas vivre sans le Dakar-Niger, vous ne résisterez plus
longtemps à ceci ou à cela, etc. !
Répondez-leur en leur démontrant (les faits sont là) que
c'est bien le Sénégal qui ne peut pas vivre sans le Dakar-Niger.
La preuve a toujours été faite que notre pays se suffit à
lui-même en matière de subsistance, mais on refusait délibérément
d'y croire !
Que nous reste-t-il à faire ? C'est d'être vigilants ! Et ce, tant
qu'il y aura des bases françaises à nos portes et notamment au
Sénégal.
En effet, vous savez tous que la « mode est venue pour les capitaines,
les colonels d'occasionner des incidents regrettables » qu'un gouvernement
faible ne peut désavouer. . . Si vous tenez compte du fait que dans les
bases françaises au Sénégal se trouvent des militaires
évacués de la République du Mali, auprès d'un gouvernement
dirigé par Dia-Senghor se débattant au milieu d'agents du 2e Bureau,
vous vous ferez aussitôt une idée de l'importance de ce que je
viens de vous dire.
II découle de ce qui s'est passé et de ce qui est présentement,
que nous maintenons la rupture des relations économiques en souhaitant
toutefois que le peuple du Sénégal, auquel nous n'en voulons pas,
parvienne un jour à liquider ceux qui le persécutent et restent
responsables de son isolement.
Ceci étant dit, cette conférence ayant été située
dans le cadre qui lui est dû, voyons ensemble la situation au Mali depuis
que nous sommes devenus nous-mêmes. Voyons ce que nous avons fait, comment
nous l'avons réalisé ; voyons quels sont nos options et nos moyens,
notre programme et nos potentialités militantes et morales. Voyons ce
que nous sommes, ce que nous voulons être, ce que l'Afrique et les forces
vives du monde attendent de nous.
Nos options, quel que soit le domaine considéré, sont claires,
et depuis le Congrès du 22 septembre 1960, elles n'ont cessé de
prouver au peuple du Mali et aux peuples du monde entier combien est forte l'Union
Soudanaise et à quelle source intarissable elle puise son dynamisme.
Notre souci majeur a toujours été le renforcement de notre unité
nationale, et la voie que nous avons choisie pour arriver à ce résultat
est incontestablement la meilleure : elle est garantie par notre patriotisme
et par notre ambition collective de bâtir et de consolider les structures
de notre Etat, de satisfaire les aspirations de notre peuple.
Nous sommes partis du fait authentique qui veut que point n'est nécessaire
de disposer d'une armée, d'une police, pour mater le peuple et en faire
ce qu'on veut ! Au contraire, le Mali dans ce domaine, se distingue
par le fait que, son peuple a appris à adhérer à la politique
de son Parti national et à se mobiliser vite et bien, en tout temps et
en tout lieu à ses mots d'ordre.
Notre option de politique générale, que notre peuple approuve,
est le moyen qui permet au Gouvernement d'aller toujours de l'avant ; elle est
l'arme efficace qui lui a permis de mettre en place les structures de décolonisation
dont les résultats font aujourd'hui la fierté de chaque militant
de l'Union Soudanaise.
Camarades, notre survie dépend de notre fidélité à
nos principes qui ont donné en toute occasion, la preuve de leur solidité.
Aujourd'hui, plus qu'hier, et demain davantage qu'aujourd'hui, chaque militante,
chaque militant, selon la conception que nous avons de notre indépendance,
devra s'ériger en soldat.
Soyons toujours vigilants et disons-nous sans cesse qu'il est possible
que parmi nous, il y ait des camarades qui "subissent nos méthodes"
au lieu de reconnaître leur efficacité prouvée ; il est
possible aussi qu'il en existe qui soient mécontents parce qu'ils n'ont
pas obtenu telle ou telle place. Il est donc nécessaire que nous les
décelions, pour les convaincre d'abord par la force de notre mansuétude
et le cas échéant, par des mesures appropriées.
Camarades, notre survie dépend aussi du souci que nous aurons de la défense
de notre intégrité territoriale.
Dans ce domaine, la lutte du peuple algérien que nous soutenons est un
exemple typique, un symbole vivant de patriotisme.
Le peuple algérien vaincra, en dépit de la campagne d'atrocités
et de diversions qui y est menée depuis plusieurs années.
Le Sahara algérien reviendra à l'Algérie, quoi qu'en veuillent
décider les réactionnaires à partir de l'Algérie
et aussi du Niger où des tribus touareg sont «poussées»
à opter pour une République autonome !
La tactique est d'autant plus grossière et stérile qu'il n'y avait
pas de territoire Saharien autonome. L'Algérie ne se laissera pas amputer
d'une partie de son sol, pas plus que le Mali n'acceptera de l'être lui-aussi
: nous défendrons notre territoire par tous les moyens.
Camarades, j'aborde maintenant le problème
de l'Unité africaine. L'expérience du Rassemblement Démocratique
Africain, celle du Parti de la Fédération africaine sont des exemples
qui nous indiquent de ne plus accepter d'initiatives vers l'Unité, sans
preuves irréfutables d'identité de vues avec des Etats qui en
manifestent le désir (options politiques, économiques, culturelles
et sociales). Nous acceptons la coopération avec tous, nous la pousserons
avec tous jusqu'au niveau de la coordination entre nos organismes et ceux des
Etats bien disposés à le faire. Il est bon de rappeler que dans
ce domaine précis, l'exemple de l'Union des Etats Africains, celui des
Etats de la Charte de Casablanca, constituent une preuve tangible de la volonté
de nos peuples de s'unir et de poursuivre ensemble la lutte.
Concernant notre politique internationale, nous sommes farouchement anticolonialistes,
ce qui explique et détermine notre solidarité à l'égard
du peuple algérien et de son digne représentant le G.P.R.A. qu'on
refuse de reconnaître et que l'on voudrait quand même obliger à
parler au nom de l'Algérie, pour décider des statuts qu'on voudrait
imposer à celle-ci ou trancher le problème du Sahara !
Devant de telles contradictions, on se demande si l'Afrique ne devient pas le
dernier refuge de la morale universelle !
En effet, pourquoi « le monde libre » laisse-t-il massacrer les
Algériens, les Angolais, les Congolais luttant au nom de la liberté
?
Quant à nous, nous ne jugerons pas les puissances
en fonction du rapport de leurs forces, mais seulement - et seulement - selon
la signification qu'elles donnent à la liberté. Nos amis seront
ceux-là qui s'opposeront à la domination d'un peuple par un autre
peuple ; nos amis seront ceux-là qui apporteront leur appui inconditionnel
à la lutte de libération menée par les peuples opprimés
; nos amis seront ceux qui n'exigeront de nous aucune condition, qui ne nous
demanderont pas de nous aligner sur telle ou telle position.
Nous coopérerons avec tous les peuples, mais surtout ave
ceux qui nous reconnaîtront des droits et qui les reconnaîtront
à tous les hommes dans tous les domaines.
A ceux qui prétendent que nous pencherons vers le communisme, vers le
capitalisme, nous répondrons que nous ne considérons pas ces «
mots en tant que mots simplement ", mais que nous jugerons et capitalistes
et communistes en fonction strictement du comportement de chacun de ces tenants,
envers nous, envers nos problèmes, envers nos aspirations.
Nous dénonçons, et combattrons à
outrance le néo-colonialisme.
Le néo-colonialisme ? C'est pour un pays «indépendant»
de se voir administrer indirectement par son ex-puissance colonisatrice, par
l'intermédiaire des traîtres qu'elle a aidés à se
hisser au pouvoir, et qui constituent désormais des remparts entre ce
pays et l'extérieur.
Nous dénonçons non seulement le néo-colonialisme, mais
nous dénonçons et condamnons aussi la tendance des puissances
qui manifestent leur volonté de dominer politiquement et économiquement
les Etats en voie de développement.
Nous dénonçons et condamnons l'impérialisme,
pour le mépris qu'il éprouve à l'égard des hommes
et des institutions qui se refusent à épouser son point de vue.
Camarades, en votre nom, j'affirme que notre neutralité n'est pas celle
de l'homme qui regarde brûler la case de son voisin sans se déranger
; elle n'est pas celle du pays qui en laisse détruire un autre par un
puissant du jour, sous prétexte que cela ne le regarde nullement. Notre
neutralité n'est pas celle des « sans avis » sur le problème
crucial du désarmement.
Pour nous, militants de l'Union Soudanaise-R.D.A., la neutralité c'est
avant tout la possibilité de prendre position devant n'importe quel problème.
Pour nous, aucun pays africain ne saurait être neutre à l'égard
du problème algérien aucun pays africain ne saurait être
neutre devant les drames tunisien et angolais.
Nous, de l'Union Soudanaise-R.D.A., nous sommes avec les peuples algérien
et tunisien, contre la France ; nous sommes avec le peuple angolais contre le
Portugal,- nous sommes avec le peuple congolais contre la Belgique.
En ce qui concerne le désarmement, nous serons d'accord avec la morale
et la sécurité internationales. Notre accord sur un point quelconque
avec un bloc quelconque, ne signifiera pas alignement sur ce bloc ; il sera
plutôt l'effet d'un hasard qui concrétise une identité de
vue sur un problème précis.
Notre neutralisme imprimera le cachet de notre appréciation même
sur l'aide étrangère dirigée vers nous.
En tous cas, nous ne serons jamais neutres devant la lutte anticolonialiste.
En tout état de cause, nous rappelons bien fort et bien clairement que
nos options sont nettes. Elles nous ont valu des ennemis. . . Des pays voudront
notre voix et tant d'autres choses encore !
D'aucunes puissances vont jusqu'à affirmer que notre pays, par sa position
centrale, est devenu comme une «pomme de terre pourrie dans un sac»,
et songent dès lors à concevoir comment elles devront agir pour
préserver ce qu'elles appellent des « esprits encore sains »
contre le danger que nous représentons.. .
Tout cela, camarades, nous incite à la vigilance.
Notre point de vue est sans équivoque. Nous aiderons tous les peuples
qui luttent pour leur liberté. C'est notre devoir ; mais ce devoir comporte
des risques et certains camarades ne réalisent pas encore suffisamment
la gravité de la situation résultant de nos options.
Je dis même qu'il ne faut pas écarter la possibilité des
attentats politiques ! C'est pourquoi en ce moment, vigilance est synonyme de
premier mot d'ordre du Parti et du Peuple.
Le mot socialisme effraie certaines conceptions. Il
ne nous effraie pas, nous, car, nous savons que même en pays capitalistes,
l'on ne saurait se passer de ce mot. Notre socialisme ne
sera pas pour nous la manifestation d'une tendance à copier servilement
ce qui se fait ailleurs. Ensuite, nous aurons toujours en tête la notion
de nos réalités vivantes. Pour nous,
une économie socialiste doit répondre d'abord à certains
critères principaux :
- Contrôle efficace de l'Etat au niveau de la production et des échanges
;
- Suppression de l'anomalie que constitue l'importation de produits dont les
homologues se trouvent chez nous ;
- Etatisation des secteurs vitaux ;
- Mouvement coopératif au niveau des secteurs de production et de consommation
;
- Etre maîtres du choix de nos investissements, de nos crédits
d'investissement.
Nous imposerons des conditions à l'installation des industries chez nous,
c'est pourquoi nous disons que nous devons être maîtres des crédits
d'investissement. Cela nécessite évidemment bien du courage et
de la fermeté.
D'ailleurs, penserons-nous un seul instant que les privés accepteront,
dans les conditions que nous exigerons, l'installation d'industries ? Penserons-nous
un seul instant que leurs gouvernements vont nous accorder des capitaux qui
serviront à leur liquidation ?
Ne nous faisons pas d'illusion ! Nous serons aidés
certes, mais disons-nous qu'un pays ne se construit jamais rien qu'avec l'aide
extérieure, et soyons convaincus qu'un tel pays n'est jamais indépendant
!
L'Union Soudanaise et ses militants savent depuis longtemps qu'un pays qui veut
se construire affronte les difficultés, accepte les sacrifices, sinon
il ne sera rien. Ces vérités sont bonnes à connaître,
car jusqu'ici, nous n'avons pas encore pris toutes les mesures nécessaires
au succès. Mais nous affirmons qu'elles seront prises, à l'heure
convenue ! Elles le seront même à l'encontre de certains militants.
Nous avons un Plan qui vient d'être approuvé par l'Assemblée
Nationale ; sa réussite dépendra de ce que nous serons maîtres
de nos investissements. Pour sa réussite, des mesures ont été
déjà prises ; d'autres le seront. Il nous faut gagner la bataille
et nous la gagnerons.
Indépendamment de nos potentialités propres qui sont nos meilleurs
atouts, nous avons envoyé des missions partout, sans distinction et,
à ceux qui pourraient en cachette nous le reprocher, nous disons que
dans le domaine des échanges économiques au moins, le principe
de la « coexistence pacifique » a donné des preuves de sa
réalité.
Nous ajoutons que pour nous, pays en voie de développement,
il faut recourir à tous les moyens. Nous voulons faire comme les autres.
Nous voulons nous développer et nous accepterions même l'aide du
diable, à condition qu'elle respecte rigoureusement nos options.
Pour nous, il n'est pas question de revenir en arrière, un seul instant
en arrière sur notre option.
Au contraire, il faut accélérer la marche, vite atteindre l'objectif
dans le minimum de temps et avec le minimum de garantie.
Notre Assemblée a voté le Plan Quinquennal du Mali qui prévoit
la mise en place d'industries de consommations (alimentaires, textiles, cuir,
production de matériaux de construction, etc.).
Nous produirons tout ce que nous sommes en mesure de produire. Cependant,
nous n'avons pas négligé le sous-sol ; mais il faut que vous sachiez
tous qu'il est avant tout indispensable de faire vivre et d'habiller l'homme
et trouver sur place certaines matières premières susceptibles
d'occuper les industries que nous allons installer, avant de songer aux projets
ambitieux d'industrialisation lourde.
Le Mali est indépendant, non seulement depuis un an, mais il le sera
davantage encore dans les années à venir. Il a donné des
preuves irréfutables de son indépendance et continuera à
en donner. C'est ainsi que notre peuple et notre parti en ont décidé.
Dans quelques jours, se tiendra la Conférence des pays non alignés
à Belgrade. Beaucoup de bruits circulent déjà autour de
cette conférence. Ce que nous pouvons vous affirmer dès maintenant,
c'est que la délégation malienne à cette conférence
se déterminera clairement en votre nom sur tous les problèmes
vitaux, à savoir :
- L'anticolonialisme ;
- Le désarmement ;
- Les essais nucléaires ;
- La paix mondiale ;
- La coexistence pacifique ;
- Le problème de Berlin.
Il ne s'agira pas pour nous de la création d'un troisième
bloc, il s'agira pour nous d'affirmer en toute lucidité qu'aucun régime
ne saurait être imposé au monde.
Nous ferons remarquer que le Tiers Monde peut et doit apporter sa contribution
impartiale, dans la stricte objectivité, à la recherche des solutions
aux problèmes qui concernent l'humanité entière.
Pour nous, il est clair que la paix internationale est la meilleure garantie
de notre développement et nous ne manquerons pas de souligner notre déception
de voir le désaccord grave existant entre deux blocs qui, hier seulement,
étaient d'accord pour combattre le fascisme et l'hitlérisme. ..
Nous savons que ceux qui ont souffert de la guerre ne
veulent jamais de la guerre ; nous savons aussi que ceux qui s'enrichissent
de la guerre sont les seuls à vouloir de la guerre. La
position du Mali sera nettement définie, à l'occasion de la Conférence
de Belgrade. Cela lui permettra alors de voir avec qui la coopération
sera encore possible.
Le Mali, territoire intérieur, avec ses positions objectives se créera
fatalement des ennemis. Ces derniers feront tout pour que nous échouions,
car ils savent que cet éventuel échec pourra être exploité.
Nous en sommes conscients, c'est pourquoi nous disons qu'il n'est pas question
pour nous d'échouer, car ce serait l'échec de toute l'Afrique
et un soufflet à la morale universelle.
C'est pourquoi, camarades, nous ne devons plus raisonner en
ramenant la situation à nous-mêmes, à l'échelle individuelle.
II y a trop à faire et il est nécessaire d'intensifier encore
davantage le travail de masse. Les responsables devront multiplier les relations
avec les masses, et en retour, celles-ci devront voir davantage mieux en eux
des guides, des conseillers. C'est plus que jamais une impérieuse nécessité,
qui permettra à tous d'apporter une contribution efficace à la
construction nationale. Dans cette oeuvre gigantesque et exaltante, chacun de
nous a sa part.
Les agents de l'Administration à tous les échelons, doivent
être des éducateurs s'ils ont conscience de leur double rôle
de militants et de responsables.
Il n'est pas dit que le Mali deviendra un jour, à la fois paradis et
enfer pour des catégories de citoyens ! Nous nous souviendrons toujours
que nous sommes les cadres d'un Parti dont les responsables ont été
brimés par le régime colonial, ont couché par terre, circulé
dans la boue, à pied, à vélo, pour apporter la bonne parole
et donner le bon exemple dans les coins les plus difficilement accessibles du
pays.
« De tels responsables ne devront jamais se trahir.. »
Avant de terminer, je salue :
- Les femmes auxquelles je demande de rester toujours les amazones vigilantes,
gardiennes incorruptibles des vertus
du Parti et du Peuple :
— Les jeunes respectueux des mots d'ordre du Parti que j'exhorte à
ne jamais se laisser gagner par le régime des facilités. Mes salutations
vont également aux brigades de vigilance, aux milices populaires, au
service civique rural, bref, à toutes ces organisations de jeunesse qui
ont toujours accepté les sacrifices, dont les cadres sont appelés
à assumer demain
les responsabilités qui incombent aujourd'hui aux aînés.
Agissez bien, vous jeunes, afin que demain le pays ne fasse pas appel à
des cadres précocement pourris. Ne soyez pas brigadiers, seulement
la nuit, soyez-le dans les bureaux, dans les ateliers. Exercez sans défaillance
la mission qui vous est confiée. Dénoncez objectivement tout ce
qui est suspect et antiparti, antipeuple, antimalien, anti-africain.
Sachez que nous avons des adversaires parmi les Maliens et non Maliens.
« Et si jamais vous avez le sentiment que vous êtes contrés
dans votre tâche, adressez-vous au secrétaire général
et président du Gouvernement. »
M'adressant aux vieux, partout sages en Afrique, je dis :
— Vos fils et votre peuple vous saluent, ils vous respectent et vous vénèrent
parce que vous auriez pu vous désintéresser de l'avenir du pays
en disant : « Ce n'est plus de notre âge ; nous nous tenons à
l'écart... » - Sachez que notre reconnaissance va vers vous et
nous vous demandons de continuer à prier pour nous, à nous aider
par vos conseils éclairés.
- A vous, travailleurs, j'adresse le salut du Parti. Vous avez déjà
fourni les preuves de votre fidélité à notre idéal
et à notre peuple. Faites en sorte que cessent les calomnies que certains
lancent à l'adresse du camarade fidèle au Parti et au Gouvernement.
Ce camarade fidèle ne mérite pas qu'on le traite de « suiviste
» ou de « conformiste ».
N'écoutez pas ceux qui vous disent qu'il « n'y a plus de syndicat
» ou qui vous tiennent des propos antipatriotiques. Ce qui est vrai, c'est
que nous ne sommes plus à l'ère des revendications stériles.
»
La seule revendication valable aujourd'hui c'est l'aspiration pour chacun de
nous à être le meilleur commis, le meilleur instituteur, le meilleur
ouvrier, enfin, le meilleur bâtisseur de la nation malienne.
Ceux qui diffusent des idées subversives doivent être décelés
et balayés du Parti.
Travailleurs, votre rôle est de dire votre point de vue partout où
vous êtes, partout où vous serez ; cela est d'autant plus facile
que vous êtes présents dans tous les organismes de l'Etat.
Vous, militaires, qui avez été comme nous à notre niveau,
victimes de la dépersonnalisation, je suis certain que vous faites de
notre armée une armée du peuple, qui sera toujours à côté
du peuple.
A vous, anciens combattants qui avez libéré des peuples, aidé
à libérer les peuples de ceux qui opprimaient votre pays, le Parti
et le Gouvernement vous adressent leur salut ! Nous vous félicitons de
votre contribution : faites tout pour que vive et prospère ce Mali que
vous avez libéré, créé, qui est soumis aux regards
amis et ennemis.
Militantes et militants, de toutes régions, anciens et nouveaux, continuez
à ne voir que le peuple et le Mali ; travaillez pour la construction
nationale et la coopération pacifique de notre peuple avec tous les autres
peuples.
Sachez que celui qui ne fait rien ne risque pas de se tromper.
Ce qui compte, c'est le dévouement inlassable au peuple, au Parti, pour
la garantie de notre succès. ..