“Pourquoi le salaire ne suffit pas en Afrique
”
Adapté de l’interview de Marcel Zadi Kessy
Le Patriote - 8/16/2004 1:48:55 AM
Tout salaire légal, c’est-à-dire fixé conformément
aux normes en vigueur, doit pouvoir permettre à son bénéficiaire
de subvenir à ses besoins du mois. Force est de constater, cependant,
que de nombreux salariés Africains, et paradoxalement les mieux payés
souvent parviennent difficilement à joindre les deux bouts comme on
le dit. Cela est lié avant tout à la nature de l’environnement
familial
La famille élargie, un tourbillon
En plus de sa famille nucléaire (lui, son épouse, son ou ses enfants), qu’il va bâtir après l’acquisition d’un emploi, le travailleur Africain, bien souvent est celui qui doit satisfaire les desiderata d’un autre groupe de personnes. Ce sont ceux les “proches parents” (les père et mère, les tantes, les oncles, les cousins etc), “les parents éloignés” (parents du village, du clan de la tribu etc) et les “autres” que sont les camarades et amis souvent pris en compte dans la notion de famille élargie. Conséquence, le salarié se retrouve de loin ou de près responsable de plus de dix personnes. S’il doit les accueillir sous son toit, son espace de vie devient alors exigu et incompatible à l’épanouissement.
La tendance à vivre au-dessus de ses moyens
Une autre cause et non des moindres des difficultés du salarié Africain, c’est sa grande tendance à vivre au-dessus de ses moyens : “En général nos dépenses ne sont pas adaptées à notre revenu”. Il s’agit-là de la manifestation de l’une des caractéristiques de l’homme africain, notamment son attachement au prestige ou à l’honneur. “La recherche de l’honneur individuel ou familial le conduit souvent à faire des dépenses inconsidérées, en voulant, par exemple, s’offrir une voiture alors qu’il n’en a pas les moyens, ou en voulant célébrer comme l’autre un mariage ou des funérailles grandioses”.
Un environnement économique instable
La crise économique en rajoute aux problèmes du salarié qui est amené à faire face à une inflation galopante sur le marché des biens et services. Par ailleurs il y a la précarité de l’emploi, en l’occurrence chez les travailleurs du secteur privé où les licenciements pour motifs économiques sont légion.
Et arrive enfin le chaos
Conjugués les facteurs susvisés créent une situation de
difficultés permanentes pour le salarié. Face aux nombreux imprévus,
il lui devient impossible de planifier ses dépenses. “Les sollicitations
diverses l’empêchent d’épargner correctement pour assurer
ses vieux jours”. Dans la pratique, ce chaos se traduit par des difficultés
à scolariser et à éduquer convenablement ses propres enfants
; Les ressources étant partagées avec d’autres personnes.
Le cadre ne peut pas non plus investir pour donner une assise financière
à sa famille. Son temps ne lui appartient plus d’autant plus qu’il
est obligé de le partager entre les activités communautaires et
professionnelles. Toute chose qui peut avoir une influence sur son rendement.
Son espace vital devenu exigu du fait du nombre élevé des membres
de la famille se transforme en un lieu d’insalubrité où
le manque d’hygiène est source de santé précaire.
Le stress qui naît des incertitudes du salarié est alors la cause
de nombreux conflits conjugaux qui, dans certains cas, entraînent la séparation
du couple et l’échec scolaire des enfants. Dans cette situation
le travailleur a tendance à se surendetter pour subvenir à ses
besoins propres, et dans bien de cas à ceux de sa communauté “clanique”.
Les dettes sont contractées auprès de l’employeur, des sociétés
de crédit ou des usiniers. Dans le pire des cas, il a recours aux fraudes
et aux malversations financières.
Adapté de : Fins de mois difficiles : Marcel Zadi Kessy : “Pourquoi le salaire ne suffit pas en Côte d’Ivoire”
http://www.abidjan.net/actualites/h/99507.html
INAEDAD-RIEASDA